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16 janvier 2010 6 16 /01 /janvier /2010 08:11

L'histoire qui suit est vraie; elle situe bien l'importance et la crainte qu'évoquent les souvenirs des chefs marquisiens qui vivaient dans ces îles il y a un siècle et demi.

Chef Marquisien

 

Ce samedi, je suis parti avec mon ami Toti,un  marquisien de Ua Pou, descendant de l'ancien chef de l'île : Heato. Nous avions pour but une visite de la tombe du chef sanguinaire. Celle-ci se trouve à mi-hauteur d'une grande colline qui surplombe la magnifique baie de Hakamoui. A la pointe de cette colline, se trouve un pae pae qui était réservé aux guetteurs.

baieloin

La baie de Hakamoui dans la vallée des rois, vue de la tombe de Heato

 

Nous avons donc pris un chemin qui serpente entre les acacias, les cabanes des squatters et les anciens pae pae. Afin de simplifier les rapports, nous avons un peu discuté avec les habitants illicites…. Leurs habitations sont constituées de simples tôles supportées par des poteaux en bois. Une couche rudimentaire est installée sur le sol. Ils cultivent des ananas, des bananes et autres plantes locales ; ils élèvent des chèvres.

Après avoir réglé ces préliminaires, nous nous sommes dirigés vers la tombe ; la pente était forte, le sol glissait et les acacias étaient nombreux. Nous sommes arrivés enfin près du pae pae mortuaire et là Toti m'a précisé : « quand j'étais jeune, nous venions chasser le cochon et la chèvre et il était de circonstances de respecter le silence des lieux, de respecter Heato… ». L'ancien chef a manifestement laissé une grande crainte parmi les habitants de la vallée et notamment ses descendants. « Tu sais, il a bouffé beaucoup de monde ici ; quand on revenait de la pêche, on laissait toujours un poisson sur les pierres de son pae pae et chaque fois, celui-ci avait disparu lorsque nous vous repassions ensuite »

Heato 7401

Le "hae tupapa'u" (habitation du mort)

 

Mon ami était manifestement très ému à l'approche du lieu funéraire. Au centre du pae pae funéraire, on voyait la dalle centrale qui recouvrait le corps ; elle avait basculé et on pouvait facilement distinguer l'intérieur de la tombe. Une dalle verticale semblable à celle qui présente l'épitaphe sur une tombe ordinaire était restée en place ; aucune inscription bien sûre puisque l'écriture n'existait pas…Heato est mort en 1845. Deux dalles latérales qui étaient appuyées pour former un chapiteau étaient toujours là. L’usinage fin  des dalles qui s’encastrent très bien était étonnant; l'édifice a été construit à l'époque de la pierre polie, il n'y avait pas d'outils en métal.

dalleproche

J'en profitais pour faire de nombreuses photos et je m'approchais du trou béant qui permet d'observer l'intérieur. Toti me fit remarquer : « ce n'est pas du remblai, la tombe est  creusée dans la roche, elle s'agrandit dans le fond par rapport au trou de surface ». Il me vint donc l'envie de prendre en photo l'intérieur de la tombe. Je pris 1,2, trois photos puis m’approchais et là…, je constatai soudain que mon appareil etait bloqué : simple problème technique certainement. Je reculai un peu et vérifiai si  mon appareil fonctionnait à nouveau. Stupeur ! Il refusait de prendre la photo. Je connais les croyances locales et en bon provocateur les ai déjà transgressées bon nombre de fois avec succès. Je recommençai l'opération : nouveau blocage dès que je m'approchais de la dalle. Je fis l'expérience  une dizaine de fois avec le même résultat : l'appareil fonctionnait en dehors de la dalle et se bloquait dès que l'on entrait dans la tombe.

dalle1

Je reste cartésien, il n'est pas question d'adhérer à des superstitions pareilles ; je fus tout de même très intrigué et déstabilisé. Quant à mon ami, il manifestait clairement des regrets quant à notre venue en cet endroit redoutant peut-être une suite à problèmes.

 

Nous redescendions ; j'étais très intrigué et Toti, lui, manifestait ses certitudes..."je n'aurais jamais dû venir ici avec un "hao'e" (blanc)"

De retour au village, nous devions rencontrer son fils à qui nous racontâmes les péripéties. Il interrogea immédiatement son père : « est-ce que tu as fait les incantations dans la brousse avant d'arriver à la tombe ?

-non, répond Toti

-mais pourquoi n'as-tu pas fait les incantations ?... »

IOTETE

 

De retour chez moi, je racontai l'histoire à un ami qui me conseilla de retourner à la tombe pour vérifier et peut être comprendre...je refusai car il est essentiel de respecter ces éléments de la culture marquisienne. 

Plus tard, dans mon bureau, après avoir fait des expériences, je compris que c'était l'autofocus de mon appareil qui avait tout bloqué pour protéger le capteur. Tout semblait alors clair...mais nous n'étions pas au bout de nos surprises...puisque quelques semaines plus tard nous conduisions une équipe de télévision qui réalisait un reportage pour ARTE et cette fois-ci...c'est le cameraman qui fit une faute professionnelle très regrétable devant la tombe et perdit le film où un descendant faisait des offrandes pour demander l'autorisation de filmer.

Cette succession de fautes techniques est étonnante...elle préserve le crédit de la superstition et nous laisse humble avec nos certitudes un peu trop carrées...

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commentaires

M
<br /> ça m'énerve les gens comme vous ,laisser l'endroit tranquille,tu attendais quoi?? qu'il vous arrive quelque chose de grave, pour arreter de faire le malin??<br /> <br /> <br />
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