L'arbre à pain , uru en tahitien et mei en marquisien, a représenté la base de l'alimentation aux Marquises. Tuhatete nous explique qu'il y avait des champs de cet arbre et que l'on produisait beaucoup de fruits. L'arbre, envahissant avec ses grosses racines, a ensuite été arraché dans beaucoup de terres pour établir des habitations.
Actuellement, il est toujours très consommé dans les vallées peu approvisionnées en produits importés mais se consomme plutôt dans les repas de fête "en ville"...
Il existe de nombreuses espèces de mei et chacune a ses qualités propres.
Les anciens, conservaient les fruits dans des "ua ma" (silos) où , fermentés "pupuhi", ils pouvaient servir pendant plusieurs années.
Tuhatete, comme de nombreux habitants de Taipivai se souvient de la mise en place du "ua ma".
On gardait les fruits cueillis(entiers ou épluchés avec des coquillages tranchants) pendant une semaine sous des feuilles et ils finissaient de mûrir, devenant mous. Ensuite, on épluchait ceux qui étaient entiers, on enlevait le noyau central et on pétrissait la pâte dans un trou profond de pierres, tapissé de tresses de auti (plante à feuilles larges habituellement utilisée pour la confection des costumes de danse). Il ne fallait pas laisser d'air et le tout était recouvert d'un toit végétal.
Au bout d'un mois, le ua ma était ouvert et on retirait les impuretés ainsi que de gros vers qui avaient affiné la pâte.
Le contenu du premier silo était transporté vers le second ua ma où la conservation allait durer plusieurs années (en fonction des besoins et des sécheresses...).
Les prélèvements se faisaient ensuite pour alimenter la famille; on mélangeait une moitié de pâte fermentée avec une autre moitié de pâte fraîche (lorsque tout allait bien); Tuhatete se rappelle des périodes difficiles où on ne mangeait que la popoi fermentée car il n'y avait pas de fruits frais...c'était âpre et pas vraiment fameux!
Actuellement, le ua ma est utilisé pour piéger les cochons sauvages...on fabrique la popoi dans des citernes en plastique...
Mais les outils de cuisine n'ont pas changé et sont de merveilleuses sculptures chargées de culture.
Losque l'esprit rêve...les produits consommés sont meilleurs...le teint de la peau...le surlignage des yeux , le parfum ambré des délices pétris et la musique rythmée du pilonnage...de quoi mettre en ébullition tous les affamés de ce monde...
De la poésie partout...
Et la nostalgie de ce tiki, le seul survivant (blessé...)de l'île de Ua Pou après la destruction par les éclésiastiques, au milieu du 19° siècle, des représentations traditionnelles...