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1 mars 2011 2 01 /03 /mars /2011 04:19

ffemmes 002

Les croyances traditionnelles sont solides et même si les missionnaires ont tout fait pour les remplacer par "leur version...!", elles subsistent, très solidement, dans la société.

Presque tous les marquisiens ont eu l'occasion de sentir la présence de l'au-delà, les cris, les murmures ou même les persécutions que les "vehine ae" leur imposaient.

Ces "femmes méchantes" ou "femmes transparentes" seraient des esprits issus d'une fin de vie tragique. Les femmes mortes en couches étaient très redoutées par les anciens et leurs sépultures étaient implantées ...loin de la tribu car on redoutait leur vengeance; les femmes trompées qui s'empoisonnaient avec des fruits toxiques de la brousse pour venir terroriser les amants infidèles l'étaient tout autant.

Actuellement, selon mes amis, ...ces "vehine ae" existent toujours ; on peut les rencontrer dans les endroits chargés de "mana" (les vallées "tabu", les "meae", les anciens "pae pae") et on ne prend pas les choses à la légère...

doc 005

Sur cette ancienne gravure représentant des chefs ou des grands prètres, on voit que les yeux des notables sont barrés par un tatouage noir typique: le "mata epo"; comprenons "les yeux sales".

Ces chefs avaient le pouvoir de distinguer, après la mort d'un individu, le départ de son âme qui quittait le corps pour rejoindre l'au-delà. Ils tentaient parfois de convaincre l'âme de rester dans le corps pour que la vie continue mais il était interdit à tous les autres individus de voir , dans les yeux du grand prètre, l'image de l'âme...sous peine de mort!

Ainsi, ce tatouage était-il un rempart préservant le secret de la mort.

GRAV3

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10 février 2010 3 10 /02 /février /2010 07:51
pakoko4 001
Pakoko est un Chef de Nuku Hiva, qui a marqué l'histoire des Marquises. Il reste le symbole de l'indépendance face au colonialisme. Le représenter, le faire revivre, d'os et de bois , ce chef , amateur de chair humaine, qui finit sous le feu des fusils de l'armée après un procès bâclé ...c'est prendre de la distance avec les scripts habituels...
Le courage du personnage, qui se livre pour éviter des représailles et devient un martyre, fait oublier son passé et ses actes . L'histoire est un tissu de thèses et antithèses écrites ou racontées par des témoins partiaux; un "loupé" pour l'armée française qui n'a pas su l' honorer comme il le fallait préférant soutenir son rival Temoana .
Mais c'est comme cela que naissent les héros, ces repères fondamentaux pour fédérer les idéologies...
Jeanne D'Arc, récupérée ...ailleurs...par des mouvements politiques ...était-elle vierge? (comme on le dit...et on s'en fiche), belle? (pas sûr...), intelligente (peut-être...) sourde? (elle devait avoir un trouble nymphomane qui fait ressentir des présences nébuleuses...) et Dieu avait-il pris parti pour l'armée française contre les anglais?
Toujours est-il...qu'elle est devenue "héros" et même "sainte"...alors...Pakoko? pourquoi pas?
kuku pakoko
Kuku, un sculpteur d'une grande gentillesse , parent de Pakoko, nous montre la pierre contre laquelle Pakoko fut fusillé
"l'armée française a déconné!" nous précise-t-il.
Mortpakoko
Après sa mort, Pakoko fut enterré à l'emplacement de ce hangar à bateau, mais son corps fut dérobé par deux jeunes de sa famille et emporté "on ne sait où..."
Le grand regret de Kuku est de ne pas connaître l'emplacement de sa tombe "un mystère de famille".
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16 janvier 2010 6 16 /01 /janvier /2010 08:11

L'histoire qui suit est vraie; elle situe bien l'importance et la crainte qu'évoquent les souvenirs des chefs marquisiens qui vivaient dans ces îles il y a un siècle et demi.

Chef Marquisien

 

Ce samedi, je suis parti avec mon ami Toti,un  marquisien de Ua Pou, descendant de l'ancien chef de l'île : Heato. Nous avions pour but une visite de la tombe du chef sanguinaire. Celle-ci se trouve à mi-hauteur d'une grande colline qui surplombe la magnifique baie de Hakamoui. A la pointe de cette colline, se trouve un pae pae qui était réservé aux guetteurs.

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La baie de Hakamoui dans la vallée des rois, vue de la tombe de Heato

 

Nous avons donc pris un chemin qui serpente entre les acacias, les cabanes des squatters et les anciens pae pae. Afin de simplifier les rapports, nous avons un peu discuté avec les habitants illicites…. Leurs habitations sont constituées de simples tôles supportées par des poteaux en bois. Une couche rudimentaire est installée sur le sol. Ils cultivent des ananas, des bananes et autres plantes locales ; ils élèvent des chèvres.

Après avoir réglé ces préliminaires, nous nous sommes dirigés vers la tombe ; la pente était forte, le sol glissait et les acacias étaient nombreux. Nous sommes arrivés enfin près du pae pae mortuaire et là Toti m'a précisé : « quand j'étais jeune, nous venions chasser le cochon et la chèvre et il était de circonstances de respecter le silence des lieux, de respecter Heato… ». L'ancien chef a manifestement laissé une grande crainte parmi les habitants de la vallée et notamment ses descendants. « Tu sais, il a bouffé beaucoup de monde ici ; quand on revenait de la pêche, on laissait toujours un poisson sur les pierres de son pae pae et chaque fois, celui-ci avait disparu lorsque nous vous repassions ensuite »

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Le "hae tupapa'u" (habitation du mort)

 

Mon ami était manifestement très ému à l'approche du lieu funéraire. Au centre du pae pae funéraire, on voyait la dalle centrale qui recouvrait le corps ; elle avait basculé et on pouvait facilement distinguer l'intérieur de la tombe. Une dalle verticale semblable à celle qui présente l'épitaphe sur une tombe ordinaire était restée en place ; aucune inscription bien sûre puisque l'écriture n'existait pas…Heato est mort en 1845. Deux dalles latérales qui étaient appuyées pour former un chapiteau étaient toujours là. L’usinage fin  des dalles qui s’encastrent très bien était étonnant; l'édifice a été construit à l'époque de la pierre polie, il n'y avait pas d'outils en métal.

dalleproche

J'en profitais pour faire de nombreuses photos et je m'approchais du trou béant qui permet d'observer l'intérieur. Toti me fit remarquer : « ce n'est pas du remblai, la tombe est  creusée dans la roche, elle s'agrandit dans le fond par rapport au trou de surface ». Il me vint donc l'envie de prendre en photo l'intérieur de la tombe. Je pris 1,2, trois photos puis m’approchais et là…, je constatai soudain que mon appareil etait bloqué : simple problème technique certainement. Je reculai un peu et vérifiai si  mon appareil fonctionnait à nouveau. Stupeur ! Il refusait de prendre la photo. Je connais les croyances locales et en bon provocateur les ai déjà transgressées bon nombre de fois avec succès. Je recommençai l'opération : nouveau blocage dès que je m'approchais de la dalle. Je fis l'expérience  une dizaine de fois avec le même résultat : l'appareil fonctionnait en dehors de la dalle et se bloquait dès que l'on entrait dans la tombe.

dalle1

Je reste cartésien, il n'est pas question d'adhérer à des superstitions pareilles ; je fus tout de même très intrigué et déstabilisé. Quant à mon ami, il manifestait clairement des regrets quant à notre venue en cet endroit redoutant peut-être une suite à problèmes.

 

Nous redescendions ; j'étais très intrigué et Toti, lui, manifestait ses certitudes..."je n'aurais jamais dû venir ici avec un "hao'e" (blanc)"

De retour au village, nous devions rencontrer son fils à qui nous racontâmes les péripéties. Il interrogea immédiatement son père : « est-ce que tu as fait les incantations dans la brousse avant d'arriver à la tombe ?

-non, répond Toti

-mais pourquoi n'as-tu pas fait les incantations ?... »

IOTETE

 

De retour chez moi, je racontai l'histoire à un ami qui me conseilla de retourner à la tombe pour vérifier et peut être comprendre...je refusai car il est essentiel de respecter ces éléments de la culture marquisienne. 

Plus tard, dans mon bureau, après avoir fait des expériences, je compris que c'était l'autofocus de mon appareil qui avait tout bloqué pour protéger le capteur. Tout semblait alors clair...mais nous n'étions pas au bout de nos surprises...puisque quelques semaines plus tard nous conduisions une équipe de télévision qui réalisait un reportage pour ARTE et cette fois-ci...c'est le cameraman qui fit une faute professionnelle très regrétable devant la tombe et perdit le film où un descendant faisait des offrandes pour demander l'autorisation de filmer.

Cette succession de fautes techniques est étonnante...elle préserve le crédit de la superstition et nous laisse humble avec nos certitudes un peu trop carrées...

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